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    Égaré dans l'espace-temps, un engin spatial américain s'écrase en 3978 sur une planète inconnue. Les astronautes Taylor, Landon et Dodge découvrent que les hommes primitifs de cette planète mystérieuse sont placés sous le joug de singes très évolués...

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    La Planète des Singes (1968) - Franklin J. Schaffner

    Adapté du roman éponyme de Pierre Boulle, ce film fut et reste un choc. Mené par un Charlton Heston musclé, indépendant et macho, le film nous dépeint des singes parlant et agissant comme nous, tandis que les humains, dénués de parole voire d'intelligence, sont enfermés dans des cages et soumis à des expériences.

    Mêlant le thème souvent exploité en science fiction écrite de " La Race qui nous succédera " et la peur atomique typique des années 1960, le film de Scaffner se distingue par une splendeur plastique rarement égalée, et une remarquable intelligence de situations comme de dialogues. Les figurants singes, 200 au total, maquillé par John Chambers secondé par 78 techniciens, sont d'une expressivité total et les décors trouvés en Arizona et en Utah, avec ces montagnes rouge brique au centre desquelles scintille l'eau turquoise du lac où s’abîmera l'astronef, imposent la réalité d'une monde étranger, quand bien même ce monde est la Terre du futur.

    Les joutes oratoires entre Taylor et Zaius sont toujours d'une grande subtilité, féroces aussi, l'orang déclarant : " L'homme tue tout ce qu'il trouve dans la forêt. puis il migre vers nos zones de cultures et il les détruit. Plus tôt nous l'aurons exterminé, mieux ça voudra ! "  D'une tout autre nature, les rapports de l'astronaute avec Cornélius et Zira, les deux chimpanzés éclairés qui lui reconnaissent les premiers son statut d'être intelligent, sont plein de poésie, d'humour aussi, la savante nommant 
    Charlton Heston " Beaux Yeux " mais, alors qu'il part, répugne de l'embrasser en lui disant : " Tu es décidément trop laid. ". Chaque détail compte, ainsi de Taylor éclatant de rire en voyant Landon planter sur le sol de la " nouvelle " planète un petit drapeau américain, ou découvrant dans une caverne une poupée qui dit " maman " en anglais, ce qui commence à lui faire devenir la vérité.

    La Planète des Singes (1968) - Franklin J. Schaffner

    Mais le plus important dans le film n'est pas dans la forme mais dans le message de tolérance qui rend le film encore plus attachant. Pierre Boulle voulait dans son roman dénoncer la bêtise humaine, et notamment les guerres à répétition, la course à l'armement, la perversion par l'homme de toute avancée technologique. L'inversion des rôles donne une grande force à la dénonciation tout en évitant tout en évitant l'écueil du sentimentalisme ou discours moralisateur. Elle fait rejaillir l'absurdité de notre monde, trouvant un allié en Taylor, cynique utopiste qui a participé à la mission pour fuir la Terre.

    Notons au passage que Rod Sterling, le créateur de la série télévisée culte 
    "La Quatrième dimension " participe activement au scénario. Il ajoute ainsi l'idée de guerre nucléaire qui était d'actualité à cette époque avec la course des Etats-Unis et de l'URSS, il déplace le récit en 1972 et transforme les astronautes français en américains. Il situe clairement l'action sur Terre et modifie la fin en utilisant la statue de la liberté.

    Au tribunal, lorsque Cornélius et Zira disent que Taylor est le chainon manquant et que Taylor explique d'où il vient, les trois juges se couvrent simultanément les yeux, les oreilles et la bouche, en allusion aux singes de la sagesse.

    Le maquillage des singes a été créé par John Chambert. Il disposait d'une équipe de 80 personnes. Avant le film avait passé de nombreuses heures au zoo de Los Angeles à étudier l'expression faciale des singes.

    Un budget revu à la baisse de 5,8 millions de dollars est alloué au projet. Les acteurs faisant les singes étaient obligés de garder leur maquillage pendant les pauses parce que cela aurait pris trop de temps pour les remaquiller. Une trentaine d'année plus tard, le remake de Tim Burton aura droit à un budget de cent millions de dollars sans hésitation. Mais le film de Tim Burton n'atteint pas la force, l’enthousiasme, la grandeur et la poésie de celui-ci. 

     

    Sorti la même année que 2001, la Planète des singes, à l'égal de son illustre compagnon, a définitivement fait entrer la SF dans l'âge adulte.
    Un grand classique à voir et à revoir.

     


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